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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3839/2022

ATAS/81/2023 du 06.02.2023 ( AI ) , ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3839/2022 ATAS/81/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 6 février 2023

6ème Chambre

 

En la cause

 

Madame A______, domiciliée au GENÈVE, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Sarah BRAUNSCHMIDT SCHEIDEGGER

 

 

recourante

contre

 

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE, sis rue des Gares 12, GENÈVE

 

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Madame A______ (ci-après : l’assurée ou la recourante), née le ______ 1976, originaire de Bosnie, titulaire d’un permis B, mariée, mère de trois enfants nés en 1995, 2000 et 2006, a suivi l’école obligatoire en Bosnie et est entrée en Suisse en 2001.

b. Elle a travaillé comme concierge, femme de chambre et nettoyeuse. Depuis le 4 mai 2009, elle travaillait à l’Hôtel L_______, avec un dernier jour de travail effectif le 27 janvier 2014 et une incapacité de travail à 100% depuis le 28 janvier 2014.

B. a. Le 10 septembre 2014, l’assurée a déposé une demande de prestations d’invalidité en raison d’une fibromyalgie débutée en janvier 2014.

b. L’office de l’assurance-invalidité (ci-après : OAI) a pris en charge des cours de français et de bureautique en faveur de l’assurée, ainsi que des stages d’orientation professionnelle aux établissements publics pour l’intégration (ci-après : EPI) et des cours de coaching.

c. Le 2 juillet 2015, le service médical régional (ci-après : SMR) a rendu un rapport d’expertise rhumato-psychiatrique à la suite de l’examen de l’assurée du 29 juin 2015 (docteurs B______, FMH médecine physique et réadaptation et rhumatologie et C______, FMH psychiatrie et psychothérapie). L’assurée se plaignait de cervicalgies, de lombalgies, de douleurs aux cuisses et de douleurs cutanées superficielles diffuses, de douleurs à l’épaule droite, aux bras et dans tout le corps, de céphalées en casque, parfois d’acouphène bilatéral. Les experts ont indiqué qu’il n’y avait pas de diagnostics avec répercussion durable sur la capacité de travail et ont posé ceux, sans répercussion sur la capacité de travail, de fibromyalgie, de trouble de l’adaptation, réaction mixte anxieuse et dépressive en rémission complète, difficultés dans les rapports avec le conjoint ou partenaire, expérience de catastrophe, de guerre et d’autres hostilités et pré-obésité. La fibromyalgie n’était pas accompagnée d’une comorbidité psychiatrique manifeste, d’une perte d’intégration sociale dans toutes les manifestations de la vie, d’un état psychique cristallisé ou profit tiré de la maladie, « ni l’échec de traitement » ; l’assurée avait actuellement seulement un traitement en réserve. En dépit de ses douleurs chroniques, elle assumait parfaitement bien les activités de la vie quotidienne, elle s’occupait de ses enfants et de son mari. Vu qu’elle avait de très bonnes ressources d’adaptation aux changements, qu’elle ne souffrait d’aucun trouble de la personnalité morbide ni d’une autre pathologie psychiatrique aiguë ou chronique, le pronostic à moyen et long terme était favorable ; il n’y avait pas de limitations fonctionnelles à caractère incapacitant. Elle aurait pu reprendre son activité professionnelle dès mi-mars 2014.

d. Par décision du 5 avril 2016, l’OAI a rejeté la demande de prestations.

e. À la demande de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice, saisie d’un recours contre la décision précitée (cause A/1404/2016), la doctoresse D______, FMH médecine interne et rhumatologie, a indiqué, les 9 août et 21 octobre 2016, que l’assurée présentait des douleurs de l’épaule droite sur tendinopathie de la coiffe des rotateurs et un syndrome douloureux chronique. En raison des douleurs de l’épaule droite, elle était limitée dans les travaux lourds répétés, les ports de charges et les manipulations répétées avec le membre supérieur droit. Depuis fin janvier 2014, l’assurée pouvait travailler dans une activité légère, sans port de charges, sans travaux lourds et sans activités répétées avec le membre supérieur droit. Elle ne pouvait plus travailler comme femme de chambre. La Dresse D______ contestait l’absence de limitations fonctionnelles établie par le SMR ; depuis son arrêt de travail, l’assurée gérait de manière totalement différente les activités répétées, les ports de charges à domicile et les symptômes étaient évidemment moins importants que lors de son activité professionnelle. Il était tout à fait possible que, si elle reprenait l’activité de femme de chambre à 100%, les douleurs et les atteintes s’aggraveraient à nouveau rapidement.

f. Le 5 septembre 2016, la chambre de céans a entendu les parties en audience de comparution personnelle.

g. À la demande de la chambre de céans, les docteurs E______, FMH psychiatrie et psychothérapie, F______, FMH psychiatrie et psychothérapie, et Madame G______, psychologue spécialisée en psychothérapie FSP de l’association Appartenances, ont indiqué le 12 septembre 2016 que l’assurée présentait les diagnostics de trouble de l’adaptation, réaction mixte, anxieuse et dépressive (F43.22), des difficultés dans les rapports avec le conjoint ou le partenaire (Z63.0), autres événements difficiles ayant une incidence sur la famille et le foyer (Z63.7), expérience de catastrophe, de guerre et d’autres hostilités (Z65.5). Les limitations fonctionnelles étaient essentiellement physiques. D’un point de vue psychique, elles étaient en lien avec les répercussions de l’état anxieux et dépressif, à savoir fatigabilité, sentiment d’incapacité de faire face, découragement. L’assurée avait une capacité de travail dans une activité adaptée, après une réadaptation professionnelle. Ils contestaient l’appréciation de la Dresse C______ en mentionnant la présence d’une humeur dépressive, une anxiété, une inquiétude, un sentiment d’incapacité à faire face, à faire des projets, une altération du fonctionnement quotidien et des troubles du sommeil. L’assurée n’était pas capable de travailler depuis mars 2014 comme femme de chambre mais dans une activité en accord avec ses limitations physiques et psychologiques.

h. Par arrêt du 20 mars 2017 (ATAS/21/2017) la chambre de céans a constaté que les avis de la Dresse D______ étaient convaincants ; la recourante présentait des douleurs de l’épaule droite sur tendinopathie de la coiffe des rotateurs malgré les traitements effectués dans les règles de l’art et excluant l’ancienne activité de femme de chambre ; l’atteinte était moins symptomatique avec l’arrêt de l’activité professionnelle mais augmentée avec la reprise d’une telle activité et les limitations fonctionnelles décrites correspondaient à celles retrouvées dans le cadre d’une tendinopathie de la coiffe. Il convenait en conséquence de retenir que la recourante était incapable d’exercer son ancienne activité de femme de ménage mais présentait une capacité de travail entière dans une activité légère, respectant les limitations fonctionnelles fixées par la Dresse D______, soit sans port de charges, sans travaux lourds et sans activités répétées avec le membre supérieur droit. Quant à l’aspect psychique, les Drs E______ et F______ avaient estimé que les limitations fonctionnelles étaient essentiellement physiques et que, du point de vue psychique, elles étaient dues à de la fatigabilité, un sentiment d’incapacité de faire face et du découragement ; la recourante présentait cependant une capacité de travail dans une activité adaptée à ses limitations physiques, après une réadaptation professionnelle. Dans ces conditions, la chambre de céans a renoncé à investiguer l’aspect psychique, l’avis des médecins traitants de la recourante ainsi que le propre avis de celle-ci sur sa capacité de travail rejoignant les conclusions de la Dresse C______. La recourante présentait une capacité de travail nulle dans son ancienne activité et totale dans une activité légère, adaptée à ses limitations fonctionnelles. Le degré d’invalidité était de 2%, de sorte que la recourante n’avait droit ni à une rente d’invalidité, ni à une mesure de reclassement. En revanche, la cause était renvoyée à l’intimé afin qu’il octroie à la recourante la mesure d’ordre professionnel la plus appropriée à sa situation, en prenant en compte les observations déjà faites par les EPI et le coaching professionnel quant aux compétences et capacités de la recourante à exercer une activité professionnelle.

i. Le 16 octobre 2017, l’assurée a été reçue par la réadaptation professionnelle de l’OAI et une mesure d’aide au placement a été convenue chez IPT (intégration pour tous), du 17 novembre 2017 au 31 mai 2018. Un stage de gouvernante d’étage dans un hôtel a été interrompu en raison de douleurs et l’assurée a effectué un stage de nettoyeuse dans un EMS qu’elle a pu assumer seulement à 50%, en raison de fatigue et douleurs. Le rapport final d’IPT concluait à des emplois d’employée de maison / femme de chambre et réception / accueil.

j. Depuis août 2018, l’assurée a effectué des missions temporaires pour des postes de nettoyeuse dans des EMS et le 2 novembre 2018, l’OAI a clos le mandat à l’issue de la mesure de placement. L’assurée a travaillé comme femme de ménage, à la demande, de juillet 2018 à décembre 2019, pour Proman Recrutement SA.

C. a. Le 12 octobre 2020, l’assurée a déposé une nouvelle demande de prestations, en mentionnant une incapacité de travail totale depuis janvier 2020 pour fibromyalgie importante et état dépressif et anxieux existant depuis au moins 2012.

b. Le 13 octobre 2020, l’OAI a octroyé à l’assurée un délai pour communiquer tout document rendant plausible une aggravation de son état de santé.

c. L’assurée a communiqué

·         un rapport de la doctoresse H______, FMH médecine interne, du 14 décembre 2020, selon lequel elle présentait une fibromyalgie depuis 2012, qui s’était aggravée depuis 2017 et était devenue invalidante, de sorte qu’elle ne pouvait exercer une activité de nettoyeuse, femme de chambre, aide-soignante ou manutentionnaire dans la vente ; son état psychique s’était péjoré, ce qui aggravait les douleurs ;

·         un rapport du docteur I______, FMH rhumatologie, du 5 décembre 2019, attestant d’exacerbation des douleurs depuis quelques mois, avec tristesse et troubles du sommeil. Il a retenu une fibromyalgie avec probable épicondylite évoluant depuis un mois et probable tendinopathie du moyen fessier.

d. Le 8 janvier 2021, le SMR a estimé que l’assurée présentait un tableau clinique similaire à celui pris en compte lors de l’instruction initiale. Aucun élément ne rendait plausible une modification notable et durable de l’état de santé.

e. Par projet de décision du 21 janvier 2021 et décision du 8 mars 2021, l’OAI a refusé d’entrer en matière sur la nouvelle demande de prestations.

f. Le 20 avril 2021, l’assurée, représentée par une avocate, a recouru auprès de la chambre de céans (cause A/2699/2021) à l’encontre de la décision précitée, en concluant à ce que l’OAI entre en matière sur la nouvelle demande de prestations, son état de santé s’étant aggravé par l’augmentation des douleurs, de l’état dépressif et anxieux et par l’aggravation de l’état de santé de son époux. Des troubles cognitifs étaient évoqués par sa médecin traitante ainsi qu’une aggravation de la fibromyalgie.

g. Le 19 octobre 2021, l’OAI a conclu au rejet du recours, en soulignant que la Dresse H______ n’apportait aucun élément objectif pour rendre plausible une aggravation de l’état de santé de l’assurée.

h. Le 23 décembre 2021, l’assurée a répliqué, en communiquant un rapport de la doctoresse J______, FMH psychiatrie et psychothérapie, et de Madame G______, psychologue, du 6 décembre 2021, concluant à une capacité de travail nulle de l’assurée, suite à une aggravation de l’état de santé depuis deux ans. Elles ont posé les diagnostics de trouble dépressif récurrent, épisode actuel moyen (F33.1), d'anxiété généralisée (F41.1), de difficultés dans les rapports avec le conjoint ou le partenaire (Z673.0), d'autres événements difficiles ayant une incidence sur la famille et le foyer (Z63.7) et d'expérience de catastrophe, de guerre et d'autres hostilités (Z65.5). L'assurée présentait plusieurs limitations fonctionnelles, à savoir une importante fatigabilité, une inquiétude généralisée et incapacitante, des troubles du sommeil, des troubles de la concentration avec difficultés mnésiques et un sentiment d'incapacité à faire face aux aléas quotidiens avec une altération du fonctionnement. L'aggravation était en lien, d'une part, avec les limitations physiques provoquées par la fibromyalgie importante et invalidante et, d'autre part, avec un épuisement psychique dans le contexte familial. L'intensité des symptômes dépressifs et anxieux était augmentée avec comme conséquence d'importantes difficultés à mener les activités de la journée à leur terme, des difficultés de sommeil perturbant la journée, des oublis fréquents et un découragement généralisé. La compliance de l'assurée était excellente.

i. Le 31 janvier 2022, l’OAI s’est rallié à un avis du 21 janvier 2022 du SMR, estimant que le rapport précité du 6 décembre 2021 n’apportait pas d’élément objectif en faveur d’une aggravation de l’état de santé de l’assurée.

Selon le SMR, il ressortait de l'examen bidisciplinaire du 2 juillet 2015 que le mari de l'assurée était capable de conduire régulièrement, il pouvait donc lui apporter son soutien dans le cadre des tâches ménagères. Par ailleurs, deux de ses enfants étaient adultes et sa dernière fille avait 15 ans, de sorte qu'elle pouvait également lui apporter de l'aide. Les éléments du rapport du 6 décembre 2021 étaient essentiellement descriptifs et basés sur les déclarations de l'assurée. L'assurée n'avait pas nécessité une hospitalisation ou une modification du traitement médicamenteux et une modification récente des modalités de suivi n'était pas précisée.

j. Le 11 février 2022, l’assurée a sollicité un délai pour produire des avis médicaux de ses médecins.

k. Par arrêt (ATAS/173/2022) du 28 février 2022, la chambre de céans a rejeté le recours (cause A/2699/2021) interjeté par l’assurée au motif que les éléments médicaux au dossier, au 8 mars 2021, ne permettaient pas d’admettre une aggravation notable de l’état de santé de la recourante. Le constat établi par la Dresse H______, dans son avis du 14 janvier 2020, avait déjà été pris en compte lors de l’examen de sa première demande de prestations et ne permettait pas de conclure à une incapacité de travail dans les activités jugées adaptées à son état de santé. Les diagnostics qu’elle posait étaient similaires à ceux qui avaient été retenus à l’époque. Il en était de même du rapport du 5 décembre 2019 du Dr I______, lequel faisait notamment état d’une fibromyalgie déjà connue et d’examens sanguins dans la norme. Par ailleurs, conformément à la jurisprudence, les rapports médicaux qu'avait transmis la recourante à l’appui de son recours ne pouvaient pas être pris en compte et il n'était pas donné suite à la demande de la recourante de pouvoir communiquer à la chambre de céans d’autres pièces médicales.

D. a. Le 5 avril 2022, l’assurée a déposé une nouvelle demande de prestations d’invalidité en raison d'une aggravation de son état de santé sur le plan physique mais également psychique. Elle renvoyait au rapport médical du 6 décembre 2021 de la Dresse J______ et de Madame G______ communiqué à l’appui de son recours du 20 avril 2021.

Elle a également produit un avis médical de la Dresse H______ du 21 février 2022, dans lequel il est précisé que l'aggravation évoquée dans le rapport du 14 décembre 2020 résidait principalement dans un trouble généralisé de douleurs au niveau de toutes les zones articulaires et périarticulaires provoquant des insomnies. Cette symptomatologie était liée à une dégradation de son état psychique et avait nécessité la mise en place d'un antidépresseur ainsi que la reprise d'un suivi avec une psychologue d'Appartenances. L'assurée était épuisée par ses douleurs, ceci d'autant plus qu'elle fournissait des soins d'assistance complète à son mari qui était au bénéfice de l'assurance-invalidité complète depuis février 2019.

b. Par courrier du 8 avril 2022, l'intimé a accordé un délai de 30 jours à l'assurée pour lui faire parvenir d'autres documents médicaux que ceux envoyés. À défaut, une décision de non-entrée en matière serait rendue.

c. Le 10 août 2022, le Dr K______ du SMR a rendu un rapport prenant en compte l'avis médical du 21 février 2021 de la Dresse H______. L'assurée n'avait pas de prise en charge par un spécialiste en psychiatrie et n'avait pas été hospitalisée. Les troubles évoqués par la Dresse H______ n'empêchaient pas l'assurée de fournir « des soins d'assistance complète à son mari qui est lui-même en incapacité d'accomplir des tâches quotidiennes et administratives » (sic). Il a considéré que la pièce médicale versée au dossier n'avait pas rendu plausible une modification notable et durable de l'état de santé de l'assurée depuis la dernière décision de l'OAI.

d. Par projet de décision du 11 août 2022, l’OAI a refusé d'entrer en matière sur la demande de prestations de l'assurée.

e. Par courrier du 20 juin 2022, l'OAI a accordé, sur sollicitation de l'assurée, un ultime délai au 13 octobre 2022 pour lui faire parvenir des éléments susceptibles de modifier son appréciation.

f. En l’absence de remarques de l’assurée, l’OAI a rendu, le 18 octobre 2022, une décision de refus d’entrer en matière.

g. Par courrier du 13 octobre 2022, reçu le 19 octobre 2022 par l'intimé, l'assurée a contesté l’absence de suivi psychiatrique mentionnée par le SMR. Lors du dépôt de sa demande, elle avait expressément fait mention du questionnaire médical du 6 décembre 2021 de la Dresse J______ et de Madame G______. La mention d'un suivi psychiatrique figurait non seulement dans ce questionnaire mais aussi dans le formulaire de demande de prestations. En outre, le SMR s'était contenté de recopier l'avis médical du 10 août 2022 sans nullement le discuter. Il appartenait à l'intimé d'instruire le dossier plus avant et de questionner les médecins afin d'évaluer l'importance de l'aggravation et les conséquences sur sa capacité de travail.

E. a. Le 18 novembre 2022, l'assurée a recouru auprès de la chambre de céans à l'encontre de la décision du 18 octobre 2022, en concluant principalement à son annulation et au renvoi du dossier à l'intimé.

Elle n'était en mesure de travailler qu’à 50%. Son état de santé s'était dégradé tout d'abord en raison de l'augmentation des douleurs physiques mais également en raison de l'aggravation de l'état dépressif et anxieux. L'état de santé de son mari s'était également aggravé depuis quelques années. Par projet de décision, il s'était vu octroyer le droit à une allocation pour impotence faible. Elle gérait seule les enfants et assistait également son mari.

Selon les nouveaux éléments médicaux, les médecins psychiatres posaient un diagnostic de trouble dépressif récurrent épisode moyen (F33.1) et indiquaient que la fibromyalgie était maintenant invalidante. Sur le plan psychique, ils considéraient sa capacité de travail comme nulle. Le diagnostic de trouble dépressif récurrent épisode moyen (F33.1) était nouveau et pertinent car il servait à l'examen du caractère incapacitant d'une fibromyalgie. En outre, le SMR n'avait pas tenu compte du rapport du 6 décembre 2021 avant de statuer. Sur le plan somatique, les douleurs se trouvaient maintenant dans toutes les zones articulaires et périarticulaires alors qu'auparavant elles se situaient principalement dans les cervicales et le bras droit.

b. Le 7 décembre 2022, l'OAI a conclu au rejet du recours et à la confirmation de la décision attaquée, en soulignant qu'il n'appartenait pas à l'intimé de procéder à une instruction et de recueillir les documents médicaux nécessaires dans le cadre d'une demande de révision déposée par la recourante. En l'absence de documents médicaux objectifs, détaillés produits par la recourante dans le cadre de sa demande de prestations, il était légitime de rendre une décision de refus d'entrée en matière sur la nouvelle demande de prestations. Concernant le questionnaire médical du 6 décembre 2021, le SMR avait déjà indiqué, dans le cadre de la précédente procédure de recours, qu'il n'apportait pas d'éléments objectifs en faveur d'une aggravation de l'état de santé de l'assurée.

c. Par réplique du 6 décembre 2022, l'assurée a précisé que l'intimé ne s'était pas prononcé clairement sur les éléments d'aggravation évoqués dans le recours, à savoir le diagnostic psychique passant d'un trouble de l'adaptation avec réaction mixte anxieuse et dépressive à un trouble dépressif au sens strict, la prise d'un nouvel antidépresseur, la fibromyalgie devenue invalidante avec présence d'une comorbidité, ainsi que sur l'augmentation de la symptomatologie douloureuse avec une fibromyalgie entrainant des douleurs dans toutes les zones articulaires et périarticulaires.

EN DROIT

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             Le litige porte sur le bien-fondé du refus de l'intimé d'entrer en matière sur la nouvelle demande de prestations de la recourante.

3.             Le 1er janvier 2022, sont entrées en vigueur les modifications de la LAI du 19 juin 2020 (développement continu de l’AI ; RO 2021 705).

En cas de changement de règles de droit, la législation applicable reste, en principe, celle en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits et le juge se fonde, en règle générale, sur l'état de fait réalisé à la date déterminante de la décision litigieuse (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 ; ATF 132 V 215 consid. 3.1.1 et les références).

En l’occurrence, l’état de fait déterminant est antérieur à l’année 2022, la recourante ayant allégué une aggravation de son état de santé depuis 2020 (cf. rapport de la Dresse J______ et de Madame G______ du 6 décembre 2021), de sorte que la LAI et ses dispositions d’application seront citées dans leur teneur en vigueur jusqu’au 31 décembre 2021.

4.              

4.1 Selon l'art. 87 al. 2 et 3 du règlement sur l'assurance-invalidité (RAI), dans sa teneur en vigueur dès le 1er janvier 2012, lorsqu'une demande de révision est déposée, celle-ci doit établir de façon plausible que l'invalidité, l'impotence ou l'étendue du besoin de soins ou du besoin d'aide découlant de l'invalidité de l'assuré s'est modifiée de manière à influencer ses droits (al. 2). Lorsque la rente, l'allocation pour impotent ou la contribution d'assistance a été refusée parce que le degré d'invalidité était insuffisant, parce qu'il n'y avait pas d'impotence ou parce que le besoin d'aide ne donnait pas droit à une contribution d'assistance, la nouvelle demande ne peut être examinée que si les conditions prévues à l'al. 2 sont remplies (al. 3).

La jurisprudence développée sous l'empire de l'art. 87 al. 3 et 4 RAI, en vigueur jusqu'au 31 décembre 2011, reste applicable à l'art. 87 al. 2 et 3 RAI modifié dès lors que la demande de révision doit répondre aux mêmes critères.

4.2 L’exigence de l’art. 87 al. 3 RAI (ATF 109 V 262 consid. 3 p. 264 s.) doit permettre à l'administration, qui a précédemment rendu une décision de refus de prestations entrée en force, d'écarter sans plus ample examen de nouvelles demandes dans lesquelles l'assuré se borne à répéter les mêmes arguments, sans alléguer une modification des faits déterminants (ATF 125 V 410 consid. 2b p. 412, 117 V 198 consid. 4b p. 200 et les références). Lorsqu'elle est saisie d'une nouvelle demande, l'administration doit commencer par examiner si les allégations de l'assuré sont, d'une manière générale, plausibles. Si tel n'est pas le cas, l'affaire est liquidée d'entrée de cause et sans autres investigations par un refus d'entrée en matière. À cet égard, l'administration se montrera d'autant plus exigeante pour apprécier le caractère plausible des allégations de l'assuré que le laps de temps qui s'est écoulé depuis sa décision antérieure est bref. Elle jouit sur ce point d'un certain pouvoir d'appréciation que le juge doit en principe respecter. Ainsi, le juge ne doit examiner comment l'administration a tranché la question de l'entrée en matière que lorsque ce point est litigieux, c'est-à-dire quand l'administration a refusé d'entrer en matière en se fondant sur l'art. 87 al. 4 RAI et que l'assuré a interjeté recours pour ce motif. Ce contrôle par l'autorité judiciaire n'est en revanche pas nécessaire lorsque l'administration est entrée en matière sur la nouvelle demande (ATF 109 V 108 consid. 2b p. 114).

4.3 Le principe inquisitoire, selon lequel les faits pertinents de la cause doivent être constatés d'office par l'autorité (cf. art. 43 al. 1 LPGA), ne s'applique pas à la procédure de l'art. 87 al. 3 RAI (ATF 130 V 64 consid. 5.2.5 p. 68 s.). Eu égard au caractère atypique de celle-ci dans le droit des assurances sociales, le Tribunal fédéral a précisé que l'administration pouvait appliquer par analogie l'art. 73a RAI (cf. art. 43 al. 3 LPGA depuis le 1er janvier 2003) - qui permet aux organes de l'AI de statuer en l'état du dossier en cas de refus de l'assuré de coopérer - à la procédure régie par l'art. 87 al. 3 RAI, à la condition de s'en tenir aux principes découlant de la protection de la bonne foi (cf. art. 5 al. 3 et 9 Cst. ; ATF 124 II 265 consid. 4a p. 269 s.). Ainsi, lorsqu'un assuré introduit une nouvelle demande de prestations ou une procédure de révision sans rendre plausible que son invalidité s'est modifiée, notamment en se bornant à renvoyer à des pièces médicales qu'il propose de produire ultérieurement ou à des avis médicaux qui devraient selon lui être recueillis d'office, l'administration doit lui impartir un délai raisonnable pour déposer ses moyens de preuve, en l'avertissant qu'elle n'entrera pas en matière sur sa demande pour le cas où il ne se plierait pas à ses injonctions. Enfin, cela présuppose que les moyens proposés soient pertinents, en d'autres termes qu'ils soient de nature à rendre plausibles les faits allégués.

L'exigence du caractère plausible de la nouvelle demande selon l'article 87 RAI ne renvoie pas à la notion de vraisemblance prépondérante usuelle en droit des assurances sociales. Les exigences de preuves sont, au contraire, sensiblement réduites en ce sens que la conviction de l'autorité administrative n'a pas besoin d'être fondée sur la preuve pleinement rapportée qu'une modification déterminante est survenue depuis le moment auquel la décision refusant les prestations a été rendue. Des indices d'une telle modification suffisent alors même que la possibilité subsiste qu'une instruction plus poussée ne permettra pas de l'établir (Damien VALLAT, La nouvelle demande de prestations AI et les autres voies permettant la modification de décisions en force, RSAS 2003, p. 396 ch. 5.1 et les références; arrêt du Tribunal fédéral 8C_596/2019 du 15 janvier 2020).

Lors de l'appréciation du caractère plausible d'une modification déterminante des faits influant sur le droit aux prestations, on compare les faits tels qu'ils se présentaient au moment de la décision administrative litigieuse et les circonstances prévalant à l'époque de la dernière décision d'octroi ou de refus des prestations (ATF 130 V 64 consid. 2 ; 109 V 262 consid. 4a). L’examen du juge se limite, ainsi, au point de savoir si les pièces déposées en procédure administrative justifient ou non la reprise de l'instruction du dossier (arrêt du Tribunal fédéral 9C_789/2012 précité consid. 4.1).

5.             En l’occurrence, il convient, pour examiner le bien-fondé du refus de l’intimé d’entrer en matière sur la nouvelle demande de prestations de la recourante, de comparer les faits tels qu’ils se présentaient au jour de la décision litigieuse, le 18 octobre 2022, avec ceux présents au 5 avril 2016, date de la décision de refus de prestations de l’intimé.

5.1 Sur le plan somatique, la Dresse H______ a indiqué, dans son avis médical du 21 février 2022, que la recourante présentait une aggravation qui résidait principalement dans un trouble généralisé de douleurs au niveau de toutes les zones articulaires et périarticulaires provoquant des insomnies. Elle renvoyait à son rapport du 14 décembre 2020. Or, dans son arrêt du 28 février 2022, la chambre de céans s'était déjà prononcée sur l'aggravation décrite dans le rapport du 14 décembre 2020 et avait conclu que ce dernier ne permettait pas de retenir une aggravation notable et durable de l’état de santé de la recourante.

Par ailleurs, l'avis médical du 21 février 2022 de la Dresse H______ n’étaye pas une péjoration de l’état de santé de la recourante portant à conséquence sur la capacité de travail et de gain dans une activité légère que l'arrêt du 20 mars 2017 lui reconnaissait. Le diagnostic posé de trouble généralisé de douleurs au niveau de toutes les zones articulaires et périarticulaires provoquant des insomnies avait déjà été pris en compte lors de l’examen de la première demande de prestations. Par ailleurs, ledit rapport ne rapporte aucun changement de traitement médicamenteux ou d'autres modalités thérapeutiques qui auraient été mises en place. Il n'est pas non plus fait mention d'examen spécifique ou d'investigations complémentaires.

L'avis médical de la Dresse H______ du 21 février 2022 ne permet pas de conclure, de façon plausible, à une aggravation de l’état de santé de la recourante qui mettrait en cause l’exigibilité d’une capacité de travail de celle-ci dans une activité légère, sans port de charges, sans travaux lourds et sans activités répétées avec le membre supérieur droit, telle que retenue dans la décision de l’intimé du 5 avril 2016.

5.2 Sur le plan psychiatrique, la chambre de céans avait constaté, par arrêt du 20 septembre 2017, que les avis des psychiatres traitants rejoignaient celui du SMR et concluaient à une capacité de travail totale de la recourante.

Or, les diagnostics posés et la capacité de travail établie lors de la première demande de prestations, sont différents de ceux exposés dans la nouvelle demande du 5 avril 2022.

Par rapport du 6 décembre 2021, la Dresse J______ et Madame G______ ont notamment diagnostiqué chez la recourante un trouble dépressif récurrent, épisode actuel moyen (F33.1). L'intensité des symptômes dépressifs et anxieux était augmentée depuis deux ans avec comme conséquence d'importantes difficultés à mener les activités de la journée à leur terme, des difficultés de sommeil perturbant la journée, des oublis fréquents et un découragement généralisé. Les diagnostics posés étaient totalement incapacitants. La recourante présentait plusieurs limitations fonctionnelles, notamment une inquiétude généralisée et incapacitante. Ce tableau est plus important que celui décrit par les Drs E______, F______ et Madame G______ dans leur rapport du 12 septembre 2016. D'après celui-ci, la recourante présentait, à l'époque, un trouble de l’adaptation, réaction mixte, anxieuse et dépressive (F43.22) et une capacité de travail totale dans une activité adaptée à ses limitations, lesquelles étaient essentiellement physiques.

Par ailleurs, le 21 février 2022, la Dresse H______ a précisé que la symptomatologie de l'assurée était liée à une dégradation de son état psychique et qu'un traitement par antidépresseur avait été mis en place, ce qui corrobore, contrairement à l’avis du SMR du 21 janvier 2021, une aggravation de l’état de santé psychique de la recourante.

Enfin, contrairement à l’avis du SMR du 21 janvier 2022, le mari de la recourante, qui bénéficie d’une allocation pour impotent, ne peut lui apporter son soutien dans le cadre des tâches ménagères.

Dans ces circonstances, la recourante a rendu plausible une aggravation de son état de santé depuis la dernière décision entrée en force du 5 avril 2016 et il se justifie que l’intimé procède à un nouvel examen de son cas.

5.3 Au vu de ce qui précède, le recours sera admis, la décision du 18 octobre 2022 annulée et la cause renvoyée à l’intimé pour qu’il entre en matière sur la nouvelle demande de la recourante.

6.             La recourante obtenant gain de cause, une indemnité de CHF 1’500.- lui sera accordée à titre de participation à ses frais et dépens (art. 61 let. g LPGA ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]).

Un émolument de CHF 200.- sera mis à la charge de l'intimé (art. 69 al. 1bis LAI).

 

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L'admet.

3.        Annule la décision de l'intimé du 18 octobre 2022.

4.        Renvoie la cause à l’intimé pour qu’il entre en matière sur la nouvelle demande de la recourante.

5.        Condamne l’intimé à verser à la recourante une indemnité de CHF 1’500.- à titre de dépens.

6.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge de l'intimé .

7.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Adriana MALANGA

 

La présidente

 

 

 

 

Valérie MONTANI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le