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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1519/2022

ATAS/74/2023 du 07.02.2023 ( AI ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1519/2022 ATAS/74/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 7 février 2023

8ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié à GENÈVE, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Cyrielle FRIEDRICH

 

 

recourant

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE, sis rue des Gares 12, GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l'assuré), né le ______ 1970, employé d'entretien auprès d'une entreprise de nettoyage, a séjourné aux Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG) du 4 octobre au 12 décembre 2018, où il a bénéficié d'une transplantation hépatique le 18 novembre 2018.

b. Le 18 décembre 2019, l'assuré a déposé une demande de prestations auprès de l'office de l'assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : OAI).

c. Par avis du 23 septembre 2020, le service médical régional de l'assurance-invalidité (ci-après : le SMR), en se référant aux rapports médicaux au dossier, a considéré que l'incapacité de travail de l'assuré était totale actuellement; l'état de santé n'était pas encore stabilisé.

d. Dans un rapport du 5 octobre 2021, le docteur B______, médecin adjoint agrégé au service de gastro-entérologie et d'hépatologie des HUG, a posé le diagnostic, avec répercussion sur la capacité de travail, de status post transplantation hépatique, et celui, sans répercussion sur la capacité de travail, de diabète. Les restrictions fonctionnelles étaient une asthénie persistante, la prise de médicaments à vie, et la nécessité de contrôles réguliers. La capacité de travail de l'assuré était de 50% dans son activité habituelle, mais de 100% dans une activité adaptée.

e. Par avis du 29 novembre 2021, le SMR a retenu, à titre d'atteinte à la santé incapacitante, un status post transplantation hépatique. Le début de l'incapacité de travail totale durable remontait au 4 octobre 2018. La capacité de travail, nulle dans l'activité habituelle, était entière dans une activité adaptée dès le 5 octobre 2021. Les limitations fonctionnelles étaient : fatigue, fatigabilité, privilégier un travail sans efforts physiques intenses ou répétés, horaires réguliers, et éviter le travail de nuit.

B. a. Dans un projet de décision du 1er février 2022, l'OAI a annoncé à l'assuré qu'il entendait lui reconnaître le droit à une rente entière fondée sur un degré d'invalidité de 100% du 1er octobre 2020 (à l'échéance du délai d'attente d'un an) au 31 janvier 2022 (trois mois après l'amélioration de la capacité de gain le 5 octobre 2021, date à compter de laquelle la perte de gain s'élevait à 0%), et lui nier le droit à des mesures professionnelles.

b. En l'absence de contestation, l'OAI a confirmé son projet de décision, par décision du 7 avril 2022.

C. a. Le 12 mai 2022, l'assuré, agissant en personne, a saisi la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : chambre de céans) d'un recours contre cette décision, en concluant, sous suite de frais et dépens, à son annulation et à la condamnation de l'intimé à lui octroyer des prestations, au motif que son état de santé ne lui permettait pas de reprendre une activité et que des investigations médicales étaient en cours.

b. Dans sa réponse du 9 juin 2022, l'intimé a conclu au rejet du recours.

c. Invité à répliquer, le recourant, admis au bénéfice de l'assistance juridique dans l'intervalle (Me Cyrielle FRIEDRICH était commise aux fins de sa défense), ne s'est pas manifesté.

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             À teneur de l'art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-invalidité, à moins que la loi n'y déroge expressément.

3.             Le 1er janvier 2021 est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA. Dans la mesure où le recours (du 12 mai 2022) a été interjeté postérieurement au 1er janvier 2021, il est soumis au nouveau droit (cf. art. 82a LPGA a contrario).

4.             Le 1er janvier 2022, sont entrées en vigueur les modifications de la LAI du 19 juin 2020 (développement continu de l’AI ; RO 2021 705).

4.1 En cas de changement de règles de droit, la législation applicable est, en principe, celle qui était en vigueur lors de la réalisation de l'état de fait qui doit être apprécié juridiquement ou qui a des conséquences juridiques, sous réserve de dispositions particulières de droit transitoire (ATF 136 V 24 consid. 4.3 et la référence).

4.2 Selon les dispositions transitoires de la modification de la LAI du 19 juin 2020, pour les bénéficiaires de rente dont le droit à la rente est né avant l’entrée en vigueur de la présente modification et qui n’avaient pas encore 55 ans à l’entrée en vigueur de cette modification, la quotité de la rente ne change pas tant que leur taux d’invalidité ne subit pas de modification au sens de l’art. 17 al. 1 LPGA (let. b al. 1).

4.3 En l’occurrence, le recourant, né le 19 août 1970, était âgé de 51 ans au 1er janvier 2022, son droit (matériel) à la rente entière d'invalidité est né avant le 1er janvier 2022 (soit le 1er octobre 2019 comme on le verra plus loin) et la modification de son taux d'invalidité s'est produite avant le 1er janvier 2022 (soit le 5 octobre 2021 comme on le verra plus loin). Aussi les dispositions légales applicables seront-elles citées dans leur ancienne teneur.

5.             Le délai de recours est de trente jours (art. 56 et 60 LPGA; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative, du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

6.             Interjeté dans la forme (art. 61 let. b LPGA) et le délai prévus par la loi, compte tenu de la suspension des délais du 7e jour avant Pâques au 7e jour après Pâques inclusivement (art. 38 al. 4 let. a LPGA et art. 89C let. a LPA), le recours sera déclaré recevable.

7.             Le litige porte sur le droit du recourant à une rente entière d'invalidité au-delà du 31 janvier 2022.

8.             Selon la jurisprudence, une décision par laquelle l'assurance-invalidité accorde une rente d'invalidité avec effet rétroactif et, en même temps, prévoit l'augmentation, la réduction ou la suppression de cette rente, correspond à une décision de révision au sens de l’art. 17 LPGA (ATF 130 V 343 consid. 3.5.2; ATF 125 V 413 consid. 2d et les références; VSI 2001 p. 157 consid. 2). Tout changement important des circonstances propre à influencer le degré d'invalidité, et donc le droit à la rente, peut motiver une révision selon l'article 17 LPGA. La rente peut être révisée non seulement en cas de modification sensible de l'état de santé, mais aussi lorsque celui-ci est resté en soi le même, mais que ses conséquences sur la capacité de gain ont subi un changement important (ATF 130 V 343 consid. 3.5; ATF 113 V 273 consid. 1a; arrêt du Tribunal fédéral 9C_1006/2010 du 22 mars 2011 consid 2.2).

9.             Est réputée invalidité, l'incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à la santé physique, mentale ou psychique et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable (al. 2 en vigueur dès le 1er janvier 2008).

10.         En vertu de l’art. 28b LAI, la quotité de la rente est fixée en pourcentage d’une rente entière (al. 1). Pour un taux d’invalidité compris entre 50 et 69 %, la quotité de la rente correspond au taux d’invalidité (al. 2). Pour un taux d’invalidité supérieur ou égal à 70 %, l’assuré a droit à une rente entière (al. 3). Pour un taux d’invalidité inférieur à 50 %, la quotité de la rente est la suivante (al. 4) :

 

Taux d’invalidité

Quotité de la rente

49 %

47,5 %

48 %

45    %

47 %

42,5 %

46 %

40    %

45 %

37,5 %

44 %

35    %

43 %

32,5 %

42 %

30    %

41 %

27,5 %

40 %

25    %

10.1 Pour évaluer le taux d'invalidité, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA et art. 28a al. 1 LAI).

10.2 Selon la jurisprudence, la notion d'invalidité, au sens du droit des assurances sociales, est une notion économique et non médicale; ce sont les conséquences économiques objectives de l'incapacité fonctionnelle qu'il importe d'évaluer (ATF 110 V 273 consid. 4a). L’atteinte à la santé n’est donc pas à elle seule déterminante et ne sera prise en considération que dans la mesure où elle entraîne une incapacité de travail ayant des effets sur la capacité de gain de l’assuré (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I.654/00 du 9 avril 2001 consid. 1).

11.         En vertu des art. 28 al. 1 et 29 al. 1 LAI, le droit à la rente prend naissance au plus tôt à la date dès laquelle l’assuré a présenté une incapacité de travail (art. 6 LPGA) d’au moins 40% en moyenne pendant une année sans interruption notable et qu’au terme de cette année, il est invalide (art. 8 LPGA) à 40% au moins, mais au plus tôt à l’échéance d’une période de six mois à compter de la date à laquelle l’assuré a fait valoir son droit aux prestations conformément à l’art. 29 al. 1 LPGA. Selon l’art. 29 al. 3 LAI, la rente est versée dès le début du mois au cours duquel le droit prend naissance.

12.         Pour pouvoir calculer le degré d’invalidité, l’administration (ou le juge, s’il y a eu un recours) a besoin de documents qu’un médecin, éventuellement d’autres spécialistes, doivent lui fournir. La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l’état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l’assuré est, à ce motif, incapable de travailler (ATF 140 V 193 consid. 3.2 et les références; ATF 125 V 256 consid. 4 et les références). En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l’assuré (ATF 125 V 256 consid. 4 et les références).

12.1 Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1; ATF 133 V 450 consid. 11.1.3; ATF 125 V 351 consid. 3).

12.2 Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux.

12.2.1 Ainsi, une appréciation médicale, respectivement une expertise médicale établie sur la base d'un dossier n’est pas en soi sans valeur probante. Une expertise médicale établie sur la base d'un dossier peut avoir valeur probante pour autant que celui-ci contienne suffisamment d'appréciations médicales qui, elles, se fondent sur un examen personnel de l'assuré (RAMA 2001 n° U 438 p. 346 consid. 3d). L’importance de l’examen personnel de l’assuré par l’expert n’est reléguée au second plan que lorsqu’il s’agit, pour l’essentiel, de porter un jugement sur des éléments d’ordre médical déjà établis et que des investigations médicales nouvelles s’avèrent superflues. En pareil cas, une expertise médicale effectuée uniquement sur la base d’un dossier peut se voir reconnaître une pleine valeur probante (arrêt du Tribunal fédéral 8C_681/2011 du 27 juin 2012 consid. 4.1 et les références).

12.2.2 Un rapport du SMR a pour fonction d'opérer la synthèse des renseignements médicaux versés au dossier, de prendre position à leur sujet et de prodiguer des recommandations quant à la suite à donner au dossier sur le plan médical. En tant qu'il ne contient aucune observation clinique, il se distingue d'une expertise médicale (art. 44 LPGA) ou d'un examen médical auquel il arrive au SMR de procéder (art. 49 al. 2 du règlement sur l'assurance-invalidité du 17 janvier 1961 [RAI - RS 831.201]; ATF 142 V 58 consid. 5.1; arrêt du Tribunal fédéral 9C_542/2011 du 26 janvier 2012 consid. 4.1). De tels rapports ne sont cependant pas dénués de toute valeur probante, et il est admissible que l'office intimé, ou la juridiction cantonale, se fonde de manière déterminante sur leur contenu. Il convient toutefois de poser des exigences strictes en matière de preuve; une expertise devra être ordonnée si des doutes, même faibles, subsistent quant à la fiabilité ou à la pertinence des constatations effectuées par le SMR (ATF 142 V 58 consid. 5; ATF 135 V 465 consid. 4.4 et 4.6; arrêt du Tribunal fédéral 9C_371/2018 du 16 août 2018 consid. 4.3.1). 

12.2.3 En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a 52; ATF 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C_973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).

13.         Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3; ATF 126 V 353 consid. 5b; ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 135 V 39 consid. 6.1 et la référence).

14.         En l'espèce, la décision entreprise repose sur l'avis du SMR du 29 novembre 2021, lui-même basé sur le rapport du médecin traitant du 5 octobre 2021. En l'absence de pièces médicales remettant en cause ce rapport, il y a lieu d'admettre, avec le SMR, que le recourant, en raison d'une transplantation hépatique, est inapte à exercer son activité habituelle d'employé d'entretien depuis le 4 octobre 2018, mais dispose d'une capacité de travail entière dans une activité adaptée sans efforts physiques intenses ou répétés, dès le 5 octobre 2021. L'état de santé du recourant s'est donc amélioré à partir de cette dernière date, ce qui justifie une révision.

15.         Reste à se prononcer sur le degré d’invalidité du recourant.

15.1 Chez les assurés actifs, le degré d'invalidité doit être évalué sur la base d'une comparaison des revenus. Pour cela, le revenu que l'assuré aurait pu réaliser s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 8 al. 1 et art. 16 LPGA).

15.2 La comparaison des revenus s'effectue, en règle ordinaire, en chiffrant aussi exactement que possible les montants de ces deux revenus et en les confrontant l'un avec l'autre, la différence permettant de calculer le taux d'invalidité (méthode générale de comparaison des revenus; ATF 128 V 29 consid. 1; ATF 104 V 135 consid. 2a et 2b).

15.3 Pour procéder à la comparaison des revenus, il convient de se placer au moment de la naissance du droit à la rente; les revenus avec et sans invalidité doivent être déterminés par rapport à un même moment et les modifications de ces revenus susceptibles d'influencer le droit à la rente survenues jusqu'au moment où la décision est rendue doivent être prises en compte (ATF 129 V 222 et ATF 128 V 174).

15.4 Pour fixer le revenu sans invalidité, il faut établir ce que l'assuré aurait – au degré de la vraisemblance prépondérante – réellement pu obtenir au moment déterminant s'il n'était pas invalide (ATF 139 V 28 consid. 3.3.2 et ATF 135 V 297 consid. 5.1). Ce revenu doit être évalué de manière aussi concrète que possible si bien qu’il convient, en règle générale, de se référer au dernier salaire que l'assuré a obtenu avant l'atteinte à la santé, en tenant compte de l'évolution des circonstances au moment de la naissance du droit à la rente et des modifications susceptibles d'influencer ce droit survenues jusqu'au moment où la décision est rendue (ATF 129 V 222 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 9C_869/2017 du 4 mai 2018 consid. 2.2). Ce n'est qu'en présence de circonstances particulières qu'il peut se justifier qu'on s'en écarte et qu'on recoure aux données statistiques résultant de l’Enquête Suisse sur la Structure des Salaires (ci-après: ESS) éditée par l'Office fédéral de la statistique (ci-après: OFS; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I.201/06 du 14 juillet 2006 consid. 5.2.3 et I.774/01 du 4 septembre 2002). Tel sera le cas lorsqu'on ne dispose d'aucun renseignement au sujet de la dernière activité professionnelle de l'assuré ou si le dernier salaire que celui-ci a perçu ne correspond manifestement pas à ce qu'il aurait été en mesure de réaliser, selon toute vraisemblance, en tant que personne valide; par exemple, lorsqu'avant d'être reconnu définitivement incapable de travailler, l'assuré était au chômage ou rencontrait d'ores et déjà des difficultés professionnelles en raison d'une dégradation progressive de son état de santé ou encore percevait une rémunération inférieure aux normes de salaire usuelles. On peut également songer à la situation dans laquelle le poste de travail de l'assuré avant la survenance de l'atteinte à la santé n'existe plus au moment déterminant de l'évaluation de l'invalidité (arrêts du Tribunal fédéral des assurances I.168/05 du 24 avril 2006 consid. 3.3 et B.80/01 du 17 octobre 2003 consid. 5.2.2).

15.5 Quant au revenu d'invalide, il doit être évalué avant tout en fonction de la situation professionnelle concrète de l'intéressé (ATF 135 V 297 consid. 5.2). Lorsque l'assuré n'a pas repris d'activité, ou aucune activité adaptée lui permettant de mettre pleinement en valeur sa capacité de travail résiduelle, contrairement à ce qui serait raisonnablement exigible de sa part, le revenu d'invalide peut être évalué sur la base de données statistiques, telles qu'elles résultent de l’ESS (ATF 143 V 295 consid. 2.2 et la référence ; ATF 135 V 297 consid. 5.2 et les références). Dans ce cas, il convient de se fonder, en règle générale, sur les salaires mensuels indiqués dans la table ESS TA1_tirage_skill_level, à la ligne «total secteur privé» (ATF 124 V 321 consid. 3b/aa). On se réfère alors à la statistique des salaires bruts standardisés, en se fondant toujours sur la médiane ou valeur centrale (ATF 126 V 75 consid. 3b/bb ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_58/2021 du 30 juin 2021 consid. 4.1.1). La valeur statistique - médiane - s'applique alors, en principe, à tous les assurés qui ne peuvent plus accomplir leur ancienne activité parce qu'elle est physiquement trop astreignante pour leur état de santé, mais qui conservent néanmoins une capacité de travail importante dans des travaux légers. Pour ces assurés, ce salaire statistique est suffisamment représentatif de ce qu'ils seraient en mesure de réaliser en tant qu'invalides dès lors qu'il recouvre un large éventail d'activités variées et non qualifiées (branche d'activités), n'impliquant pas de formation particulière, et compatibles avec des limitations fonctionnelles peu contraignantes (cf. arrêts du Tribunal fédéral 9C_603/2015 du 25 avril 2016 consid. 8.1 et 9C_242/2012 du 13 août 2012 consid. 3). Il convient de se référer à la version de l'ESS publiée au moment déterminant de la décision querellée (ATF 143 V 295 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_655/2016 du 4 août 2017 consid. 6.3).

Les tableaux TA1, T1 et T17 de l'ESS 2020 ont été publiés le 23 août 2022; l’ESS 2018 a été publiée le 21 avril 2020; l’ESS 2016, le 26 octobre 2018 (étant précisé que le tableau T1_tirage_skill_level a été corrigé le 8 novembre 2018) ; et l’ESS 2014, le 15 avril 2016.

15.6 La mesure dans laquelle les salaires ressortant des statistiques doivent être réduits, dépend de l'ensemble des circonstances personnelles et professionnelles du cas particulier (limitations liées au handicap, âge, années de service, nationalité/catégorie d'autorisation de séjour et taux d'occupation) et résulte d'une évaluation dans les limites du pouvoir d'appréciation. Une déduction globale maximum de 25% sur le salaire statistique permet de tenir compte des différents éléments qui peuvent influencer le revenu d'une activité lucrative (ATF 135 V 297 consid. 5.2 ; ATF 134 V 322 consid. 5.2 et les références; ATF 126 V 75 consid. 5b/aa-cc). D'éventuelles limitations liées à la santé, déjà comprises dans l'évaluation médicale de la capacité de travail, ne doivent pas être prises en compte une seconde fois dans l’appréciation de l’abattement, conduisant sinon à une double prise en compte du même facteur (cf. ATF 146 V 16 consid. 4.1 et ss et les références). L'étendue de l'abattement justifié dans un cas concret relève du pouvoir d'appréciation (ATF 132 V 393 consid. 3.3).

Cette évaluation ressortit en premier lieu à l'administration, qui dispose pour cela d'un large pouvoir d'appréciation. Le juge doit faire preuve de retenue lorsqu'il est amené à vérifier le bien-fondé d'une telle appréciation. L'examen porte alors sur le point de savoir si une autre solution que celle que l'autorité, dans le cas concret, a adoptée dans le cadre de son pouvoir d'appréciation et en respectant les principes généraux du droit, n'aurait pas été plus judicieuse quant à son résultat. Pour autant, le juge ne peut, sans motif pertinent, substituer son appréciation à celle de l'administration; il doit s'appuyer sur des circonstances de nature à faire apparaître sa propre appréciation comme la mieux appropriée (ATF 126 V 75 consid. 6; ATF 123 V 150 consid. 2 et les références; arrêt du Tribunal fédéral 8C_337/2009 du 18 février 2010 consid. 7.5).

15.7 Depuis la 10e édition des ESS (ESS 2012), les emplois sont classés par l'OFS par profession en fonction du type de travail qui est généralement effectué. L'accent est ainsi mis sur le type de tâches que la personne concernée est susceptible d'assumer en fonction de ses qualifications (niveau de ses compétences) et non plus sur les qualifications en elles-mêmes. Quatre niveaux de compétence ont été définis en fonction de neuf groupes de profession (voir tableau T17 de l'ESS 2012 p. 44) et du type de travail, de la formation nécessaire à la pratique de la profession et de l'expérience professionnelle (voir tableau TA1_skill_level de l'ESS 2012; ATF 142 V 178 consid. 2.5.3 p. 184). Le niveau 1 est le plus bas et correspond aux tâches physiques et manuelles simples, tandis que le niveau 4 est le plus élevé et regroupe les professions qui exigent une capacité à résoudre des problèmes complexes et à prendre des décisions fondées sur un vaste ensemble de connaissances théoriques et factuelles dans un domaine spécialisé (on y trouve par exemple les directeurs/trices, les cadres de direction et les gérant[e]s, ainsi que les professions intellectuelles et scientifiques). Entre ces deux extrêmes figurent les professions dites intermédiaires (niveaux 3 et 2). Le niveau 3 implique des tâches pratiques complexes qui nécessitent un vaste ensemble de connaissances dans un domaine spécialisé (notamment les techniciens, les superviseurs, les courtiers ou encore le personnel infirmier). Le niveau 2 se réfère aux tâches pratiques telles que la vente, les soins, le traitement des données, les tâches administratives, l'utilisation de machines et d'appareils électroniques, les services de sécurité et la conduite de véhicules (arrêt du Tribunal fédéral 9C_370/2019 du 10 juillet 2019 consid. 4.1 et les références).

16.          

16.1 En l'occurrence, il y a lieu de rappeler que la capacité de travail du recourant, nulle dans toute activité depuis le 4 octobre 2018, est entière dans une activité adaptée dès le 5 octobre 2021 (avis du SMR du 29 novembre 2021, dossier intimé p. 169). Le recourant peut, par exemple, travailler en tant que préposé à l'emballage ou préparateur de commande dans l'industrie, activités très légères à légères selon la note du service de réadaptation de l'OAI du 7 janvier 2022 (dossier intimé p. 172-173).

L'incapacité de travail totale dans toute activité du 4 octobre 2018 au 4 octobre 2021 correspond à une invalidité de 100% et donne droit à une rente entière d'invalidité (ATAS/530/2021 du 1er juin 2021 consid. 14a).

16.2 L'état de santé du recourant s'est ensuite amélioré dès le 5 octobre 2021, date à compter de laquelle il est pleinement apte à exercer une activité adaptée. Dans la mesure où le changement important de la capacité de travail ayant une incidence sur la capacité de gain remonte à octobre 2021, il convient de se placer en 2021 pour procéder à la comparaison des revenus sans et avec invalidité (cf. arrêt du Tribunal fédéral I 95/07 du 15 février 2008 consid. 5).

16.2.1 En ce qui concerne le revenu sans invalidité, l'intimé s'est référé aux données statistiques résultant de l'ESS, et a retenu un revenu annuel de CHF 58'246.- (ESS 2018, tableau TA1_tirage_skill_level, niveau 1, ligne 1 [nettoyage], homme, part au 13ème salaire comprise [soit CHF 4'579.- par mois], ajusté à la durée normale hebdomadaire de travail [41,7] et réactualisé à 2021 selon l’indice suisse des salaires nominaux pour les hommes [ISS]).

Même si on tenait compte d'un revenu annuel de valide de CHF 58'246.-, supérieur à celui ressortant des indications fournies par l'ancien employeur (questionnaire pour l'employeur signé le 28 avril 2020, pièce intimé p. 117 et 119) soit une rémunération de CHF 24.35 par heure en 2018 (incluant l'indemnité de vacances, celle pour jours fériés, ainsi que le 13ème salaire) et une durée de travail de 42,5 heures par semaine, ce qui donne un revenu annuel de CHF 54'313.50 en 2021 ([24.35 × 42,5 × 52 semaines de travail = CHF 53'813.50 en 2018 et, réactualisé à 2021 [ISS; en 2018: 2260 et en 2021: 2281] = CHF 54'313.53 [53'813.50 × 2281 / 2260], ce sans avoir même déduits du temps de travail annuel les jours de vacances et de congés [cf. arrêt du Tribunal fédéral 8C_401/2018 du 16 mai 2019 consid. 4.4]) montant plus favorable au recourant , cela ne changerait rien à la solution du litige comme on le verra plus loin.

16.2.2 S'agissant du revenu avec invalidité en 2021, dès lors que le recourant n'a pas repris une activité adaptée lui permettant de mettre pleinement en valeur sa capacité de travail résiduelle, le revenu d'invalide peut être évalué sur la base des statistiques salariales figurant dans l'ESS 2018, soit celle qui était publiée le 21 avril 2020 au moment déterminant de la décision attaquée du 7 avril 2022 (arrêt du Tribunal fédéral 8C_655/2016 du 4 août 2017 consid. 6.3).

Le salaire de référence est celui que peuvent réaliser les hommes dans des activités simples et répétitives dans le secteur privé. Vu le large éventail d’activités que cette catégorie d’emplois recouvre, il y a en effet lieu d’admettre qu’un nombre significatif d’entre elles sont adaptées à l’état de santé du recourant (arrêt du Tribunal fédéral 9C_279/2008 du 16 décembre 2008 consid. 4). D’après l’ESS 2018, ce revenu s’élève à CHF 5’417.- par mois (tableau TA1_tirage_skill_level, niveau 1, total, homme, part au 13ème salaire comprise) ou à CHF 65'004.- par année (5’417 × 12). Ce salaire hypothétique se base toutefois sur une durée hebdomadaire de travail de quarante heures, inférieure à la moyenne usuelle dans les entreprises. Il convient dès lors de l’ajuster à la durée hebdomadaire normale de travail en 2021, laquelle est de 41,7 heures (tableau « Durée normale du travail dans les entreprises selon la division économique » de l'OFS), ce qui porte le salaire annuel à CHF 67'766.67 pour un plein temps (65'004 × 41,7 / 40). Réactualisé à l’année 2021 selon l’indice suisse des salaires nominaux pour les hommes (ISS ; en 2018 : 2260 et en 2021 : 2281 et non 2298 comme retenu à tort par l'intimé [dossier p. 174], puisque celui-ci correspond à l'ISS 2020), le revenu avec invalidité s'élève à CHF 68'396.36 (67'766.67 × 2281 / 2260).

Même en opérant une réduction maximale de 25% sur ce salaire (consid. 15.7 ci-dessus) étant précisé que l'intimé a appliqué un abattement de 10% , le revenu d'invalide, qui s'élèverait alors à CHF 51'297.27 (68'396.36 - 17'099.09 [68'396.36 × 25 / 100 = 17'099.09]), comparé avec le revenu sans invalidité de CHF 58'246.-, donnerait un degré d'invalidité de 11,92% ([58'246 - 51'297.27] / 58'246 × 100), arrondi à 12% (ATF 130 V 121 consid. 3.2), ce qui est inférieur au taux de 40% ouvrant le droit à une rente (art. 28 al. 2 LAI).

17.         Reste encore à déterminer les dates auxquelles la rente entière d'invalidité doit être versée, puis supprimée.

17.1 Aux termes de l’art. 88a al. 1 RAI, si la capacité de gain de l'assuré s’améliore, il y a lieu de considérer que ce changement supprime, le cas échéant, tout ou partie de son droit aux prestations dès qu’on peut s’attendre à ce que l’amélioration constatée se maintienne durant une assez longue période. Il en va de même lorsqu’un tel changement déterminant a duré trois mois déjà, sans interruption notable et sans qu’une complication prochaine soit à craindre.

La modification du droit à la rente n'intervient qu'après l'écoulement de trois mois complets (ATAS/218/2017 du 21 mars 2017 consid. 24b).

17.2 En l'occurrence, à l'échéance du délai d'attente d'un an en octobre 2019 (et non en octobre 2020, comme l'a mentionné par erreur l'intimé dans la décision litigieuse), le recourant pouvait prétendre à la rente entière d'invalidité (art. 28 al. 1 let. b et c LAI; consid. 16.1 ci-dessus).

Le recourant n'a toutefois déposé sa demande de prestations que le 18 décembre 2019, soit plus de six mois après le début de son incapacité de travail durable le 4 octobre 2018. Il s'ensuit qu'en raison de sa demande tardive, la rente ne peut lui être versée au plus tôt que le 1er juin 2020 (art. 29 al. 1 et 3 LAI) et non pas dès le 1er octobre 2020 comme retenu à tort par l'intimé.

La rente entière lui sera versée jusqu'au 31 janvier 2022 (soit trois mois après l’amélioration de la capacité de gain survenue le 5 octobre 2021), comme retenu à juste titre par l'intimé.

18.         Au vu de ce qui précède, le recours sera très partiellement admis, et la décision litigieuse réformée, en ce sens que le recourant a droit au versement d'une rente entière d'invalidité du 1er juin 2020 au 31 janvier 2022.

19.         Le recourant, représenté par son avocate, obtenant très partiellement gain de cause, une indemnité lui sera accordée à titre de participation à ses frais et dépens (art. 61 let. g LPGA; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]; art. 89H al. 3 LPA), fixée en l'espèce à CHF 200.-, étant précisé que son intervention s'est apparemment limitée à la consultation du dossier.

20.         Au vu du sort du recours, il y a lieu de condamner l'intimé au paiement d'un émolument, arrêté à CHF 200.- (art. 69 al. 1bis LAI).

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L'admet très partiellement.

3.        Réforme la décision du 7 avril 2022 en ce sens que le recourant a droit au versement d'une rente entière d'invalidité du 1er juin 2020 au 31 janvier 2022.

4.        Alloue au recourant une indemnité de CHF 200.- à titre de dépens, à la charge de l'intimé.

5.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge de l'intimé.

6.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Nathalie LOCHER

 

La présidente

 

 

 

 

Maya CRAMER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le